Cookies, ciblage, transparence : la fin des ads en ligne ?
L’Europe resserre (enfin) les boulons
L’Union européenne n’a plus envie de jouer les gentils spectateurs.
Avec le Digital Services Act (DSA) et le Digital Markets Act (DMA), entrés en application en 2024, la donne a changé.
Ces textes ont pour objectif de :
Interdire le ciblage publicitaire fondé sur des données sensibles (santé, politique, orientation sexuelle…).
Imposer un consentement explicite pour tout type de profilage.
Forcer les plateformes à expliquer clairement pourquoi une publicité est affichée.
Et garantir une transparence algorithmique sans précédent.
Meta, Google & Co : le modèle pub mis à nu
En réponse directe au DSA et au DMA, Meta a mis en œuvre plusieurs changements majeurs dès le début de l’année 2025, visibles directement dans Meta Business Manager :
Introduction d’options de publicités moins personnalisées, uniquement basées sur l’activité de session et des données démographiques basiques (âge, genre, localisation).
Réduction du prix de l’abonnement sans publicité (passant de 9,99 € à 5,99 € sur le web).
Ajustement du modèle "payer ou consentir" pour le rendre conforme aux exigences de la Commission européenne.
Résultat pour les marketeurs :
Des audiences plus petites, y compris sur des segments larges.
Des campagnes avec moins de reach, des lookalikes affaiblis, et un ciblage “intérêt” devenu flou ou indisponible.
Des outils qui affichent des estimations plus prudentes, mais plus fiables, basées uniquement sur les profils consentants et actifs.
Pour nous, cela implique de repenser nos stratégies :
Ne plus se reposer uniquement sur le pixel.
Travailler nos audiences propriétaires (1st party data) : CRM, formulaires, comportements sur site.
Intégrer l’API de conversion Meta pour améliorer la remontée de data.
Et surtout : concevoir des contenus utiles, engageants, émotionnels qui créent de vrais points de contact.
L’Europe vs les Big Tech : un bras de fer géopolitique
Ces nouvelles obligations ne sont pas de simples mesures techniques. Elles font partie d’un changement d’équilibre géopolitique.
L’UE ne veut plus être dépendante des règles américaines. Elle veut imposer son modèle, basé sur le respect de la vie privée, la transparence, et l’éthique.
C’est une forme de souveraineté numérique, face à des Big Tech qui, depuis des années, imposent leurs logiques à l’échelle mondiale.
Ce que l’on observe ici, c’est un choc culturel et politique autour de la publicité : d’un côté, une vision européenne de la protection des données et de l’autre, une vision américaine d’efficacité à tout prix (même au détriment du consentement).
En tant que marketeer, on fait quoi ?
On s’adapte. On anticipe. Et on repense notre façon de faire du marketing digital.
Voici les 5 priorités à adopter dès maintenant :
Travailler la 1st party data : collecter intelligemment (et avec consentement) des données via le site, les formulaires, le CRM.
Installer et optimiser l’API de conversion : pour continuer à tracker proprement sans dépendre uniquement du pixel.
Miser sur le contenu de valeur : des vidéos courtes, de l’UGC, des articles pédagogiques : des contenus qui captent l'attention sans profilage.
Penser omnicanal : ne pas tout miser sur Meta. Diversifier avec TikTok, YouTube, Google, email, SMS, SEO.
Raisonner parcours et engagement, pas juste clic rapide. On ne vend plus un produit à froid. On crée une expérience fluide et personnalisée, qui convertit naturellement.
Et si c’était… une bonne chose ?
Ces nouvelles contraintes nous obligent à sortir du pilotage automatique.
On revient à l’essence du marketing : comprendre son audience, l’écouter, lui proposer une vraie valeur. On quitte la logique du “micro-ciblage facile” pour entrer dans une ère de stratégie, de narration, de relation.
En 2025, faire du marketing digital, c’est aussi faire de la politique, de la sociologie et de l’éthique. Et si on transformait cette complexité en avantage compétitif ?
Conclusion
Ce que l’Europe fait aujourd’hui, ce n’est pas tuer la publicité. C’est réinventer ses règles, son cadre, et sa responsabilité.
Et pour nous, marketers, c’est le moment d’être créatifs, stratégiques et engagés. Parce que demain ne sera plus algorithmique par défaut, mais confiant, clair et humain par choix.